Yakuza Dead Saules
Par Game A le 12 janvier 2014 - La Vie vs les jeux vidéo(s).10 minutes
La série Yakuza de Sega jouit sans forcer d’une bonne place dans le panthéon des jeux les plus généreux : combats innombrables et violents, plongée sociologique et géographique dans le Japon urbain, activités innombrables et variées…
Ces jeux sont si riches que le risque est chaque fois sérieux d’abandonner le fil du scénario principal pour se laisser happer par la frénétique Kamurocho, équivalent virtuel (et assez fidèle) de Kabukicho, le Pigalle tokyoïte, noyé dans les dizaines d’alcools à goûter ou la contemplation des kimonos qui s’échancrent de quelques actrices érotiques qui cachetonnent.
Mais la série a bien davantage à offrir, certes plus discrètement : natures mortes, paysages et portraits parmi les plus célèbres du 19e s’y étalent d’épisode en épisode. Voyez comme ces jeux sont décidément généreux : beaucoup se seraient contentés des muses de Dorcel, ils visitent sans le savoir le musée d’Orsay.
Ce qui allait devenir une tradition de la série était présent dès le premier épisode (2005). Fragonard et Vermeer accompagnaient ainsi la descente des marches vers le dancing du Stardust (le seul host club du jeu).
Il faut souligner l’à-propos avec lequel les toiles ont été choisies pour un tel lieu : Jeune femme lisant (Fragonard, ~1770) et La Lettre d’amour (Vermeer, ~1669),
hommage à la beauté féminine dans l’intimité d’un tête-à-tête (dans une reproduction minuscule alors que L’Allégorie de la peinture (~1666) était la plus grande toile de Vermeer) et polissonneries galantes (Fragonard, Les Hasards heureux de l’escarpolette, ~1767).
Si le Stardust perdra ses toiles dès le deuxième épisode, ce n’est pas le cas du Serena, sempiternelle base arrière du héros. Dans Yakuza 1, la décoration s’appuyait essentiellement sur Renoir (Portrait d’Irene Cahen d’Anvers, Le Bal du moulin de la Galette) et Degas (Ballet - L’étoile).
Retapé à partir de Yakuza 3, la salle principale du New Serena alignera désormais exclusivement des paysages de Jean-Baptiste Corot :
De gauche à droite, Chemin de Sèvres, Souvenir de Mortefontaine, Paysage de La Ferté-Milon, Dans un Parc, Un Moulin à Montmartre.
Après une telle rétrospective, la présence dans le salon privé d’une grande copie de l’Ophélia de John Everett Millais (avec deux tableaux non identifiés) paraît bien incongrue.
Le bar Heart’s Angel dans le quartier « Champion district » (Shinjuku Golden Gai en vrai) penche plutôt pour Van Gogh avec deux reproductions ; un des premiers Tournesols (1888)
et Amandiers en fleurs (1890), pas loin d’être méconnaissable à cause du découpage effectué.
Le Bantam, un « pub irlandais traditionnel » à côté de la Millenium Tower, pille quant à lui Toulouse-Lautrec depuis le premier Yakuza (quand le bar s’appelait encore Bacchus). Dans le 4, ce sont au moins onze œuvres qui s’étalent sur les murs, produites entre 1889 et 1896.
On y retrouve ses affiches les plus célèbres : trois consacrées à Aristide Bruant (Eldorado, Ambassadeurs, « dans son cabaret »), la troupe de Mlle Eglantine, la Goulue et le Divan japonais.
La première mouture du Bacchus/Bantam accrochait aussi trois natures mortes, dont une de Cézanne à droite, inversée (si vous trouvez les deux autres…).
Comme au Earth’s Angel, cette mise à l’honneur d’un peintre éminent ne rime pas avec respect de son œuvre. Non seulement les couleurs des reproductions sont incroyablement ternes et gomment les détails (comme Au Moulin rouge ci-dessous, 1892),
mais les images sont souvent déformées et retaillées pour tenir dans le cadre (Salon Rue des moulins, 1894).
Ce traitement de choc aboutit par exemple à rendre le cadre champêtre de L’Abandon (les deux amies) (1895) et la pose du modèle (voire la deuxième « amie ») presque indiscernables :
Ces déformations ne sont peut-être pas toujours innocentes : le graphiste ne devait pas partager le goût d’Henri pour les rondeurs de ses modèles car la Conquête de passage (1896) a subi, comme le personnage d’Hana dans Yakuza 4 d’ailleurs, une sévère cure d’amaigrissement.
On peut tout de même s’interroger sur l’intérêt de choisir des œuvres qui de Manet à Toulouse-Lautrec se distinguent par leur technique et leur usage de la couleur pour en faire précisément disparaître l’originalité en les reproduisant ; qui retrouverait ici les traits amples et pastels du portrait de Monsieur Fourcade au bal de l’opéra (1889) ?
Quoi qu’il en soit, Toulouse-Lautrec et Pigalle plaisent beaucoup dans le quartier des plaisirs de Tokyo puisqu’on retrouve au moins deux de ses toiles au Drama Queen, un autre club du Champion District : Au Moulin rouge et L’Abandon (les deux amies) (cette fois-ci inversée, les personnages ont la tête vers la droite).
Le Club Jewel avait d’abord limité sa décoration à quelques bambins ailés dans les deux premiers Yakuza.
S’y ébattaient Amour et Psyché (1890) et L’Amour au papillon de Bouguereau
ainsi que les chérubins de La Madone Sixtine et les Amours du Triomphe de Galatée par Raphaël (~1513 pour les deux).
Depuis Yakuza 3, le Jewel présente de grandes copies d’Edouard Manet. On profite ainsi en entrant d’une grande reproduction du Bar aux Folies-Bergère (1881-1882),
tandis qu’au fond, subrepticement, on distingue le Balcon (1868-1869) :
De nouveaux angles de caméra dans Yakuza Dead Souls permettent également d’admirer Le Chemin de fer (1872-1873) et Dans la serre (1879) :
Le Club Jewel n’expose cependant pas que du Manet puisqu’au moins deux reproductions de Berthe Morisot y trônent : le Berceau (1872) à l’extrême-droite de l’image ci-dessus, et Cache-cache (1872-1873), à gauche du Bar aux Folies-Bergère ci-dessous.
Morisot étant la belle-sœur de Manet, un de ses modèles (du Balcon notamment) et le Berceau ayant appartenu à Manet, il s’agit peut-être d’une simple erreur d’attribution : les graphistes ont-ils fait leurs recherches un peu rapidement et pris ces deux tableaux pour du Manet, d’où leur présence au Jewel ?
Quelle ironie en tout cas : alors qu’il fallait s’éloigner raisonnablement de beaucoup de ces œuvres pour que notre cerveau en « synthétise » l’image, la qualité de la copie dans les Yakuza font que beaucoup deviennent très difficiles à reconnaître.
Dans un tout autre genre enfin, le Cuez Bar expose deux agrandissements du graveur et cartographe Sidney Hall (1788-1831), les constellations du Dragon et de la Petite Ourse à gauche, celle du Scorpion à droite.
Les originaux, publiés dans l’Urania’s Mirror (~1825), étaient perforés pour aligner les constellations représentées et les étoiles correspondantes.
Comme un argument supplémentaire au constat plus ou moins faux formulé dans un ancien papier, on retrouve très peu d’œuvres asiatiques à Kamurocho : dans le 4, hormis des affiches pour une exposition consacrée à Sharaku dans la Millenium Tower (on retrouve une illustration inspirée de son style dans Ryū ga Gotoku Ishin!), une reproduction géante d’une estampe de Toyokuni III Kunisada (source) au bout de Pink Street
et deux estampes non identifiées au restaurant coréen Kanrai (accrochées aussi dans Yakuza 0), c’est à peu près tout.
Pour être complet, le salon du tatoueur dans Yakuza 1 a toutefois la reproduction du célèbre Phénix d’Hokusai (original) et plusieurs posters d’Utagawa Kuniyoshi :
En bas de gauche à droite, Kintarô contre une carpe et Zhang Shun, en haut Konkôryû Rishun, Kyumonryu Shinshin contre Chokanko Chintasu et Benkei contre une (autre) carpe géante (sources).
Le manque d’estampes est particulièrement étrange si on se souvient que les quartiers de plaisir ont non seulement constitué le thème principal de l’ukiyo-e mais lui ont même donné son nom (« images du monde flottant », c’est-à-dire en particulier le « commerce de l’eau », des jeux et des amours). Cette absence est d’autant plus incompréhensible qu’on retrouve un Yoshiwara clandestin reconstitué dans une station de métro abandonnée.
A priori, les estampes ne sont pas nombreuses non plus dans Ryū ga Gotoku Ishin!, ce spin-off se déroulant en plein 19e (source de l’image).
On peut évidemment s’interroger sur l’absence de ces estampes mais, au terme de ce relevé un peu longuet, on doit d’abord se poser une autre question : pourquoi Manet, Van Gogh, Corot ? Et pourquoi ces peintures et pas d’autres ? Passe encore le Bar aux Folies-Bergère au Jewel par exemple, mais que viennent faire les instantanés de bonheur familial de Berthe Morisot dans un établissement d’hôtesses ?
Ce n’est clairement pas un amour débordant pour la peinture européenne qui s’exprime dans ces jeux* : ni l’intégrité, ni la taille, ni les couleurs des toiles ne sont respectées. Ravalées au rang d’éléments de décoration bas de gamme, elles perdent bien plus que leur « aura » (selon le concept de Walter Benjamin à l’époque de la reproduction technique des œuvres d’art) : la seule chose qu’expriment encore ces reproductions, c’est leur caractère de mauvaise copie - car il serait bien peu probable de croiser un authentique Van Gogh dans un bar minuscule du Golden Gai.
Il est passé le temps où les impressionnistes étaient comparés à des demi-fous ambitieux, où la critique parisienne vomissait sur le vert du Balcon. Aujourd’hui, ces toiles sont à ce point consensuelles qu’elles en ont perdu une part de leur charge explosive.
Leur signification évacuée, leur statut de faux revendiqué, on aboutit alors à la décoration du Jewel ou du Serena première version qui accrochaient plusieurs fois la même toile aux murs.
Ce mépris aboutit logiquement au New Serena depuis Yakuza 5 où les cadres sont restés strictement identiques mais où les toiles ont été remplacées par des photographies insipides (le Serena version Yakuza 0 et Kiwami 1 et 2, remakes PS4 des premiers jeux, exposent désormais les mêmes).
Le résultat n’est pas de meilleur goût mais il a au moins l’avantage de ne pas réduire des chefs d’œuvres à une piètre fonction décorative*. Le fait que ces tableaux disparaissent maintenant que la qualité des textures aurait permis de les reconnaître à coup sûr confirme en tout cas que leur rôle jusqu’alors se limitait souvent à remplir l’espace sans jamais divertir l’attention du joueur.
Pour un jeu qui s’est fait une spécialité de noyer le joueur sous les quêtes annexes, le paradoxe méritait d’être relevé.
* Le Bacchus a conservé ses tableaux dans Kiwami. Dans le 6 par contre, le Bantam, largement redécoré, préfère désormais lui aussi les photos kitsch, dont celle du château de Neuschwanstein (photographie qui ne devait pas être libre de droits compte tenu du filtre appliqué). Que ce soit ce type de photographies, les tableaux relevés ou les noms du bar (Bantam, sur l’île de Java, a été le premier port de commerce asiatique à accueillir les Européens), ces symboles, outre la décoration, ont peut-être simplement la fonction d’évoquer une certaine « européanité ».
En dehors des quelques images officielles, les captures d’écran ont été réalisées avec une 3DS pour Yakuza 4 (et avec un filtre « trou de serrure » en plus, pas fait exprès) ou à partir de Let’s Play dont celui de Malaho pour Yakuza 4, M0kuu pour Yakuza 2 et ParaParaKing pour Yakuza HD Wii U. La première capture d’écran a été prise ici. Les images des tableaux proviennent essentiellement de Wikipedia. En parlant des tableaux, outre ceux déjà mentionnés, je n’en ai pas identifié quatre dans Yakuza 4 ainsi qu’un dans Kiwami 2 (qui n’est peut-être qu’une photo retouchée) ; merci d’avance si vous avez une idée !
Merci enfin Ukyo pour Yakuza 4, je peux te le rendre maintenant. :)
Commentaires
Quel beau paragraphe sur la disparition de l’âme de ces peintures !
Quel gros boulot de tout reconnaître, tout répertorier, d’y prêter simplement attention…
Bref : c’est super, merci.
Serviteur.^^
C’était un peu rébarbatif à faire, j’espère que ça ne l’est pas trop à lire. Merci beaucoup en tout cas.
Beau, très beau boulot. C’est passionnant ! L’article est certes long comme le bras mais on voudrait qu’il soit long comme la jambe.
@Fabien : c’est super gentil, comme toujours ! :)
J’en profite pour te remercier de tes commentaires ces dernières années, c’est très motivant !
Passionnant, comme toujours, malgré le fait que, les années passées à bosser sur des jeux de ce calibre m’enlève un peu de cette magie qui semble, fort heureusement, encore opérer chez toi.
Je te remercie aussi pour ce passage :
Ça exprime mon sentiment vis-à-vis des jeux vidéo depuis un moment. Ils ont perdu de leur superbe à force de s’être imposés dans la vie de tous les jours du grand public. C’est quelque chose qui me travaille. Il faudrait que j’en fasse un checkpoint. Ou trente…
@Pixo Pour moi, cette chute d’intérêt coïncide avec la création de Gameblog et NoLife. Ils sont nés, comme Kotaku et autres repères mélangeant fanboys et publi-journalistes, de la prise de pouvoir du marketing et des relations presse sur la création et les systèmes de jeu.
Aucun d’entre eux n’arrive toujours pas à articuler ce qui fait la qualité d’un jeu, par contre ils se régalent à te dire lequel acheter… Le summum étant l’arrivée de deux nouvelles consoles sans améliorations ni planning de sortie, dont on a l’impression qu’elle n’existent que pour justifier l’existence de ces parasites vénaux et illettrés.
ça fait quelques années que je suis vos articles (sans jamais hésiter à les partager d'ailleurs), et je me sens un peu obligé de commenter pour une fois; en disparaissant certainement aussi vite derrière.
Jusqu'ici j'aurais aussi pu vous noyer de compliments, mais disons que je n'trouvais jamais bien quoi dire... jusqu'ici ! et ça grâce à la réponse de Game B, qui a calé le doigt pile au bon endroit : l'exacte description du fond d'ma pensée.
C'en est même troublant. Toutes ces années perdues à ne pas arriver à mettre les bons mots les uns en face des autres, alors qu'au final ce n'est qu'une question de changement d'cap, de point de vue. Cette impression d'être en général devant un bête catalogue de vente par correspondance, dans lequel on nous vante les mérites d'un produit plus que d'un autre car derrière le premier y'a de meilleurs bénéfices à gratter. Comme le bourrage de crane perpétuel qui s'enfonce de plus en plus dans la caricature, répétant bêtement les mots clés donnés par les éditeurs (un peu d'émotion peut-être ?), des tests de jeux "moins intéressants" sous la forme de tweet (comme ce fut le cas par exemple pour l'avant dernier TMNT, test écrit en se basant uniquement sur un trailer), les critères de notation, ou toute cette masturbation gênante autour de certains titres juste parce qu'on les dit "artistique", et ça même s'ils sont vide de sens et clichés. Snobant d'ailleurs la plupart des autres productions car peut-être trop subtils : ne soulignant pas assez qu'eux aussi méritent un peu d'attention en f'sant voler un groupe d'oiseaux dans un coin de l'écran en étant seulement accompagné du bruit du vent et d'un violoncelle; ou en dépouillant les décors pour laisser qu'un vaste champ vide, mais calme... et donc poétique. J'ai l'impression que ceux qui devraient savoir comment parler du jeu vidéo ne le comprennent pas, ou plus. Ou alors l'ont placé au second plan dans leurs objectifs, ou s'en foutent... En tout cas, je ne parle plus du tout la même langue qu'eux.
C'est d'ailleurs assez étonnant de voir qu'un site comme Gameblog se présente encore comme "le jeu vidéo autrement" alors qu'au final on se retrouve avec la même formule usée qu'ailleurs (le côté élitiste en plus). Il n'y a clairement que deux "choses" à ma connaissance qui pourraient se targuer d'un tel slogan, et ça depuis un bon moment : 3615 Usul d'un côté, et "la faute à la manette" de l'autre.
Car l'un comme l'autre vous n'avez pas attendu que l'auteur d'un jeu vienne vous dire d'en parler et comment le faire, comment l'appréhender, le vivre et vous gaver de ses qualités. Vous parlez de sujets "personnels" (je connais peu de personnes qui s'arrêteraient devant les tableaux des Yakuza par exemple), vous les partager sincèrement sans prendre vos lecteurs de haut et en plus c'est très souvent "juste". Bref, ça fait vraiment du bien de vous suivre.
Même si pour le coup j'ai une bonne semaine de retard sur vous.
Hello,
Je me joins au débat, car entre l'article du Doritos et les commentaires ci-dessus, j'en ai marre d'être d'accord ! :)
Je ne sais pas si ce sont NoLife ou GameBlog qui ont déclenché cette espèce de dégénérescence.
Après tout, il y avait un publique pour ça, et aujourd'hui encore il y a un publique pour les sites de jeux vidéos, à tel point que certains en vivent et font pas mal de profit (j'suis sûr que lafautealamanette rapporte d'ailleurs énormément d'argent !).
Certains sites disent leur peine de retirer la note à la fin des tests (je crois que CanardPC en avait parlé dans arrêt sur images) et ont reculé devant la pression des lecteurs.
Quelque part, cette pression c'est : vivre ou non du "journalisme" de jeu vidéo. Quelque soit ce qu'on mette derrière le terme journalisme, ce qui compte au fond c'est qu'ils en vivent, et ça suffit quelque part pour les légitimer (en tout cas, c'est d'une certaine manière les lecteurs de presse qui en donnent la définition de ce que doit être un journaliste de jeux vidéos).
J'aimerais voir un journaliste ou mieux, toute une rédaction, dire : le jeu vidéo a changé, ça nous emmerde grave aujourd'hui, on arrête et on va vous proposer autre chose de mieux. Pour le coup ça dénoterait d'une véritable indépendance. Mais la plupart sont attachés à leur situation et acceptent les changements de l'industrie - ça se comprend, même si on peut trouver ça dommage.
Bien sûr, les éditeurs ont leur part de responsabilité. Personnellement je suis producteur dans la branche européenne d'un gros éditeur japonnais, je vois de l'intérieur que les mecs ne sont pas machiavéliques ni manipulateurs (marketing ou direction). Au plus ils sont assez peu cultivés (mais c'est une marque récurrente chez les joueurs de jeux vidéos et dans son industrie), assez moyens (ils aiment les jeux vidéos, les séries télés, les mangas/BD, la musique pop/rock/électro, les derniers iPhone, les blockbusters du cinéma, lisent peu ou pas du tout), mais leurs résultats sont au final jugés sur l'argent que les jeux rapportent. Pour certains, ils sont bons businessmen, d'autres moins, mais ils ne sont pas animés d'une passion ou d'une volonté d'apporter quelque chose, d'élever le niveau des joueurs. Au final, l'ultime pression ça reste celle des actionnaires, et je pense qu'ensuite tout découle.
Bref, mon message doit être assez brouillon, mais j'ai l'impression que ces 3 facteurs: niveau des lecteurs/consommateurs, volonté des éditeurs, niveau de la presse, qui chacun découle des deux autres, font que quelque part les choses ne peuvent pas évoluer en bien. Ça n'empêche pas qu'il y ait des titres à contre courant qui fonctionnent parce qu'ils sont intelligents et de qualité... Mais même s'ils valent la peine d'exister, ils ne peuvent pas inverser ce courant car je pense que les racines sont plus profondes.
Bref, je pense que les sites de jeux vidéos, la prise de pouvoir du marketing, etc. sont en fait d'abord des symptômes avant de devenir des causes, qui peuvent alors effectivement accélérer le processus.
Cela m'amène au passage qu'a cité Pixoshiru, avec laquelle je suis également très d'accord. Et d'ailleurs j'en viens à penser que le sens qu'on met derrière le mot "art" a changé. A une époque, on débattait : est-ce que le jeu vidéo est de l'art ? Aujourd'hui, alors que c'est quasiment admis par tous, je crois que notre définition de l'art a rarement été aussi peu questionnée (voire même, plus modestement, la définition du divertissement)...
Je suis en train de lire Hamlet de Shakespeare en ce moment, où l'auteur s'exprime ainsi à travers le protagoniste :
"... du but du théâtre, qui, dès l'origine comme aujourd'hui, a eu et a encore pour objet d'être le miroir de la nature, de montrer à la vertu ses propres traits, à l'infamie sa propre image, et à notre temps même sa forme et ses traits dans la personnification du passé."
Je ne crois pas qu'il y ait une définition de l'art qui soit absolue, mais il y a certainement la définition que ses contemporains en donne. Je me demande quelle définition de l'art donneraient les journalistes, éditeurs, consommateurs et même les développeurs d'aujourd'hui.
En tout cas, encore merci pour votre blog, je l'apprécie vraiment énormément. S'il vous plait, continuez :)
PS: suite à votre précédent article:
http://upload.wikimedia.org/wikiped...
C'est celle qui a servi d'inspiration pour le prochain, j'essaie encore de trouver celle du 5.
On aimerai lire ce genre d’articles plus souvent. Excellent travail, fort intéressant !
Merci beaucoup pour cet article, qui outre ses qualités a en plus le mérite de m’avoir enfin fait comprendre le sens du titre de la chanson “le commerce de l’eau”, de Dominique A.
@Rounard : c’est inattendu mais je crois que c’est ce qui me satisfait le plus. :)