The missing piece versus Pac-Man (1979).

Retoqué lors de mon dernier sous-entendu dans le genre, je ne me risquerai pas cette fois-ci à dire que Pac-Man pourrait être inspiré par un livre pour enfants de Shel Silverstein, même si The missing Piece est sorti en 1976 et qu’il a connu une édition japonaise (pas trouvé la date d’édition là-bas cependant) : après tout, quoi de plus adéquat qu’un camembert pour symboliser l’incomplétude, point de départ des deux oeuvres ?

Les deux composent de toute façon très différemment avec cette insatisfaction : Pac-Man, autant qu’un jeu essentiel, est aussi une parabole de notre condition, de cette consommation effrenée en quête d’un objet qui un temps éloignera nos fantômes, jusqu’à notre mort ou au bug du système (au 256e tableau). Bref c’est loin d’un exemple à suivre. Shel Silverstein développe au contraire une philosophie autrement plus positive au cours du périple d’un personnage-camembert cherchant son “petit bout manquant” (le titre de la version française) qui, au terme de sa quête, apprivoisera finalement son manque. 

D’une richesse, d’une poésie incroyables, Silverstein a réussi à résumer en quelques pages sensibles ce que Nicolas Bouvier avait mis trois cents pages à cerner dans L’Usage du monde ; autant dire que Le Petit Bout manquant, c’est puissant.
Une histoire qu’il faudrait lire à tous les enfants, mais pour l’instant réservée à ceux dont les parents peuvent traduire joliment l’anglais à la volée, l’édition française étant épuisée depuis deux ans. Ils s’essayeront aux jeux vidéo quand ils sauront lire. Non mais.