Je ne vous mets pas la jaquette européenne. Trop laide.

Histoire de ne pas trop pomper l’air de ma moitié avec un nouveau casse-briques, je conclus de suite : Brick’em All DS est une de ces belles surprises à peu d’euros, comme on les oublie dans ces temps de consoles et de jeux hors de prix.

Teasing : à un moment, on apprend des choses sur Space Invaders.

Brick’em All (BA) est un des innombrables jeux du même nom édités par D3 au Japon sur tous les supports, sous l’appelation The Block Kuzushi. “Block Kuzushi”, c’est tout simplement l’expression japonaise pour “casse-briques”. Autant dire que les développeurs ne sont pas foulés pour nommer leur jeu (les Américains non plus qui, moins rieurs que les Européens, ont préféré Break’em All).

De prime abord, nommer un jeu par le genre dont il fait partie (synecdoque), ce n’est pas forcément bon signe, et peut témoigner d’une grande modestie (un casse-briques parmi d’autres, voire moins bien puisque lui ne revendique même pas un nom propre) comme d’une prétention sans borne : parvenir seul à résumer tout le genre.
Entre ces deux écueils, Brick’em All fait le mur et s’en sort dignement.

Bien sûr, BA est d’abord un petit jeu : les musiques fatiguent vite et sont peu nombreuses, les graphismes sont tout juste honnêtes (la raquette elle-même est plutôt moche), la physique de la boule est parfois frustrante (celle-ci a trop tendance à des trajectoires quasi-horizontales peu évidentes à rétablir). Quant au scénario, il n’y en a pas, même dans le mal dénommé mode quête ; dans ce contexte, les arrières-plans reprenant les géoglyphes de Nazca ne sont jamais justifiés, c’est dommage.

Pour le reste, les développeurs ont potassé leur sujet et parviennent à un résultat certes moins chatoyant qu’Arkanoid DS, mais finalement bien plus solide. Si si.

Brick’em All ne se contente pas en effet de piquer quelques célèbres configurations de briques du premier Arkanoid, il améliore la formule par quelques innovations discrètes mais bien senties.
Premier bon point, on peut lancer la boule à gauche ou à droite de la raquette en début de partie (quand depuis 20 ans Arkanoid la libère toujours à droite). Ça n’a l’air de rien[1], c’était juste incroyablement frustrant.
Autre petite chose que j’apprécie, la vitesse de la balle, qui augmente à mesure de ses rebonds, est matérialisée par un compteur en bas à gauche. Là encore, c’est discret mais essentiel pour faire monter le stress.

BA change complètement de modèle pour les options : à la manière de Gradius, on choisit et la chaîne de pouvoirs spéciaux (5 à déterminer parmi un panel de 10), et le moment de les enclencher (une jauge se remplit à mesure des rebonds et des briques détruites).


Certains joueurs se sont plaints de l’option laser, qui faciliterait trop le jeu : en transperçant toutes les briques, la jauge se remplit vite, permettant d’enchaîner les options laser à volonté. Les joueurs sont des êtres aux motivations parfois obscures.

Le message d’avertissement avant un boss pendant le quest mode (“Warning the Condor is comming”, sic) comme le scrolling vertical du décor sont d’autres clins d’oeil au SHMUP qui fonctionnent très bien (les géoglyphes sont peut-être alors un clin d’oeil à Xevious).
Parenthèse historique : les références au SHMUP fonctionnent d’autant mieux que le premier SCHMUP, Space Invaders, doit son existence au premier casse-briques, Breakout, comme Tomihiro Nishikado, créateur du jeu, l’explique dans cette interview. La boucle est bouclée.


Cette vidéo était un des bonus du jeu Taito Legends (Ps2 notamment). Elle est aussi disponible sur le site officiel de Taito Legends 2.

Pour revenir à Brick’em All, les modes de jeu sont assez variés ; les trois modes de jeu sont disponibles en solitaire: le mode quête multiplie les boss (deux joueurs peuvent s’entraider), quand le mode tokoton vous promet, à côté de 50 niveaux fixes, trois millions de niveaux créés aléatoirement. Votre score est récompensé d’un classement plus ou moins darwinien (de l’amibe au dauphin, en passant par l’alligator, le cygne, etc.). On me dit à ce propos que la dernière forme, Invincible, serait une sorte de Jésus Christ. Carrément.


La forme suivant l’homme des cavernes, “l’homme évolué”, hésite entre un personnage de Castlevania et un cyclope moustachu…

Le survival, aux règles très différentes, est finalement assez réussi. Huit joueurs peuvent s’y mesurer dans un réjouissant bordel : on choisit une forme de raquette, chacune ayant ses propres défauts, et on renvoie/évite les nombreuses boules. Ça va vite, on ne comprend rien, c’est assez joyeux et ça ne demande qu’une seule carte de jeu !


L’ambiance du mode Quest (à gauche, face au dernier boss du jeu sans doute) est très différente de celle du mode survival. À gauche, sur l’écran du haut qui ne sert à rien comme tous les jeux DS dignes de ce nom, on peut remarquer la barre d’options définie par le joueur.

Avouez, tant de générosité pour 8 €, entre Electronic Arts et Mario, on avait oublié.

Notes

[1] Gigas (Sega) permettait dès 1986 de choisir l’angle de lancer en bloquant un curseur balayant 180°, un peu trop vite malheureusement. L’angle fixe dans BA permet finalement plus de précision.