En relisant un article d’il y a tout juste deux ans de Takayuki Nakayama (chief director sur Street Fighter V), un détail à propos d’un élément de stage abandonné m’a étonné : Nakayama précisait que « le maire [était] coincé dans l’ascenseur ».

En 2016, la légende n’avait aucune équivoque : il parlait forcément de Haggar, maire de Metro City depuis Final Fight. Pourtant, et il va falloir nous y habituer après une mandature commencée en 1989, c’est maintenant Cody, venu du même jeu, qui le remplace à ce poste.

Cette petite contradiction indiquait-elle que les développeurs de Street Fighter V n’avaient pas défini en 2016 la liste des personnages voués à sortir en DLC, mais surtout que l’idée d’un Cody maire à la place de l’autre n’avait encore pas germé dans leur esprit ?

Takayuki Nakayama a eu la gentillesse de répondre, en français et sans équivoque :

L’idée que le scénario d’un jeu puisse ne pas être fixé au moment de sa sortie n’exprime sans doute que mon romantisme sur la création de jeu : c’est qu’à lire toutes ces passionnantes notes de développement dont Capcom est désormais prodigue et où le moindre détail s’avère si travaillé, comment penser que tout n’est pas maîtrisé dès le départ ? 

Ainsi dans ma tête, si Street Fighter V était sorti initialement sans mode histoire (le DLC a été proposé en juin, 6 mois après sa commercialisation), c”était uniquement parce qu’ils n’avaient pas eu le temps de l’inclure, et pas qu’ils ne l’avaient pas encore complètement écrite. Bref une bonne poire.

Pourtant, à bien y repenser, le précédent Street Fighter avait déjà donné lieu à ce genre de choses : interrogé à propos de la nationalité d’Abel, nouveau personnage de la série Street Fighter IV en 2009, Yoshinori Ono, le producteur exécutif, répondait ainsi : 

La version arcade “sous-entend” qu’il est français, mais il se peut qu’il y ait du changement d’ici là, avec les scénarios prévus pour la version console.

À force, le doute en devient méthodique. Prenons Hakan, personnage ajouté en 2010 dans Super Street Fighter IV.

Toshiyuki Kamei, le directeur artistique, était alors plein de promesses à propos de l’étonnante chevelure d’Hakan (source) :

Il y a une explication à sa coiffure, mais nous préférons la garder en secrète pour l’instant (rires). Néanmoins si vous réfléchissez à ses caractéristiques et à ses coups, vous pourriez la trouver.

Presque dix ans après, le mystère n’a jamais été dévoilé, à se demander si la solution de l’énigme existait vraiment (à l’époque, j’aurais parié que la forme correspondait à des culs de bouteilles d’huile). Est-ce que l’idée ne leur est finalement pas venue ? A moins qu’ils ne l’aient oubliée avec le temps : il y aurait les idées qui ne viennent qu’au fil de l’eau, à mesure que le jeu se peaufine, et celles qui disparaissent, faute d’avoir été rendues publiques au bon moment.