Correspondance
Par Game B le 30 mars 2009 - La Vie vs les jeux vidéo(s).2 minutes
Cher Game A,
On fétalé. Merci pour les compliments sur la bédé. Je vais sûrement en faire d’autres, vu que moi non plus c’est pas l’inspiration d’articles qui m’étouffe.
J’ai passé le week-end chez un pote qui bosse dans un site d’info sur les jeux vidéo. Il m’a montré un n° d’Amusement. J’ai retrouvé dans les deux pages d’Ours qui ouvrent le magazine, avec des biographies de rédacteurs bien trop extensives pour être humbles, des gens essentiellement venus de l’internet. Un article à propos de Devil May Cry 4 rédigé sous forme de nouvelle m’a bien fait rire. Il faudra que j’en demande un scan pour te montrer, c’est célesto-comique ;D
Du coup, on a pas mal parlé éthique journalistique et de la collusion entre RP et journaleux autour de la Passsion et de l’Affect. Comme quoi, pour juger les jeux, certains rédacteurs invoquent de plus en plus une dimension artistique floue (i.e. sans aborder une quelconque histoire de l’art) et axent leurs articles sur du ressenti (trahison supposée de l’esprit de la série, mise en avant de la personnalité du Game Designer), plutôt que sur une analyse des mécanismes de gameplay et comment la réalisation les sert ou les dessert (j’ai pris une tarte au citron au resto).
L’affect s’installe aussi dans la relation Presse avec les éditeurs, basé sur l’envoi de jeux (PressPacks Collectors etc) et l’invitation aux soirées petits fours. Journaliste dans ce secteur n’a pas l’air d’un métier facile, et un jeu gratuit ou un open-bar représentent peut-être quelques mois de salaire; ou au moins la gloire auprès des amis joueurs.
Comme dirait Rock Band : “(Would you bite) the hand that feeds you”.
Pour quelqu’un élevé dans les bons sentiments de Final Fantasy, il doit paraître injuste de frapper trop fort un mauvais jeu dont l’éditeur est quand même “sympa” avec nous.
Dans cet esprit, on peut voir passer des messages corporate genre : “t’as été un peu dur avec notre dernier jeu, tu veux qu’on en parle ? On se voit au prochain PressTour. Bisous.”. Souviens-toi, j’en avais reçu un dans le style. Le spectre de l’ingratitude doit ainsi culpabiliser pas mal de rédactions.
On a aussi parlé Kotaku, forcément. Ce fameux site anglophone qui sert d’AFP à la pas mal de sites de news français. Par moment, la dépêche en anglais semble juste passée sous BabelFish avant d’être relayée dans notre langue. Et pourtant, cette source est rarement citée. Tous les joueurs ne maîtrisant pas forcément l’anglais (déjà le français, c pa toujour sa), l’illusion fonctionne et permet de se prévaloir facilement d’une carte de presse virtuelle.
J’attends que tu me montres le magazine IG. D’ici là, je continue à lire mes GamesTM. Heureusement que j’ai appris l’anglais en jouant à Zelda et FF6 avec l’Harraps à portée de main.
Commentaires
Quoi les journalistes seraient corrompus ?
Le monde des jeux vidéos ne serait pas tout rose ?
MONDE DE MERDE
Merci pour ta réponse^^
Je comprends tout à fait la mauvaise conscience des journalistes, j'ai parfois ressenti la même : je me demande ainsi si j'attendrais autant Big Bang Mini si, via Pipomantis, Arkedo ne m'avait pas fourni le code pour retrouver les bonus de Nervous Brickdown, leur précédent jeu (que ma DS avait remis à zéro un bon matin).
Tout ça pour dire que je me sens obligé (alors que je ne suis pas journaliste, absolument pas prescripteur d'achat), comme quoi ça va très vite. C'est sans doute très difficile à gérer d'être journaliste (encore que les journalistes spécialisés dans la politique n'ont pas l'air de mal le vivre ; il doit y avoir des moyens de transiger...).
Pour IG et Amusement, j'ai aimé pas mal de choses. Dans Amusement en tout cas.
Le truc sur l'affect c'est intéressant. D'autant que ça ne les empêche pas pour autant de mettre ensuite une note sur un jeu.
Je n'ai pas eu l'occasion de mettre la main sur l'Amusement (puis à Berlin cela va être délicat) mais j'ai lu une interview de son fondateur qui ne m'a pas vraiment convaincu...j'ai même trouvé certains principes un peu louche.
Sinon le problème de la source est quelque chose qui m'énerve pas mal dans le journalisme. Le seul argument valable pour ne pas citer ses sources c'est leur protection ce qui ne doit même pas concerner 1% des articles. Après reste l'égo et une tentative maladroite pour cacher la pauvreté de trop nombreux papiers...
Sinon la taille de l'éditeur compte dans l'évaluation d'un jeu, et pas forcément à tort. Certes cela relève de l'affect et de positions plus "politiques" qu'une évaluation objective d'un jeu mais c'est normal d'être moins tranchant avec un studio qui est en difficulté avant chaque sortie. On ne peut pas considérer le jeu indépendamment de son contexte même quand celui-ci ne le concerne pas.
Cela d'ailleurs ne concerne pas uniquement les "petits jeux". Quelque part la bienveillance accordée à Mirror's Edge et à Dead Space, au-delà des grandes qualités de ces deux titres, provient du fait qu'on est habitué à des jeux commerciaux sans idées de la part d'E.A. On est plus enclin à gommer les quelques défauts de ces deux jeux car on n'attendait plus rien de cet éditeur...
Bref on est pas près de finir de débattre de ces questions... Au moins le problème se pose moins ici, vive les analyses critiques et drôles.
MMm, personnellement la seule chose qui me gêne un peu dans Amusement, c'est le côté Figaro Madame : mannequins sein(s) nu(s), des pages d'objets qui coûtent un oeil ou des revues dvd/jeux/etc. à la toute fin qui sont trop courtes pour être aussi pertinentes ou intéressantes que le reste.
En tout cas on ne peut pas leur enlever que c'est un magazine vraiment classe pour 5€ .
Assez d'accord avec le point de vue, même si je me demande réellement si on peut dire qu'à ce point de vue là le journaliste de jeu vidéo est plus mal loti que ses confrères. Daniel Schneidermann aborde ce problème avec le journaliste politique dans "C'est vrai que la télé truque les images ?" ( pas exceptionnel au demeurant ), en constatant que les journalistes deviennent très souvent "amis" avec les politiques, qui consentent à leur donner quelques commentaires "en off" et les invitent au resto s'ils publient des articles sympas sur eux ( je fais la version courte ). En devenant "ami" avec le journaliste, en effet, on s'assure qu'il ne sera pas trop méchant avec nous, et puis s'il fait chier, comme dans les jeux vidéos, on ne lui parlera plus / enverra pas de copies à tester.
Ca me rappelle une critique assez édifiante d'half life 2 sur jeuxvideo.com ( ok j'ai honte ), où le mec démontait le jeu dans son article mais finissait par lui mettre une note extraordinaire à la fin, un moyen de faire de la résistance?
Pour amusement, outre le fait qu'overgame se réfère toujours à lui et vice versa ( on se demande bien pourquoi ), je trouve que c'est un magazine dont on a toutes les raisons du monde de se moquer, tant au niveau des choix éditoriaux que du sujet de certains articles ( coucher avec un geek / une geek ... ), ou de la qualité d'écriture de certains collaborateurs. Mais dans le tas on trouve des articles extrêmement intéressants ( souvent les interviews, même si c'est franchement pas intéressant de savoir qu'un groupe de rock parisien aime les jeux vidéos ), et je dirais également que le grand nombre de rédacteurs le sauve ( parce qu'on finit forcément par y trouver quelque chose à son goût ).
Un point que tu ne soulignes pas : certains éditeurs ont la gentillesse d'être corpo, d'organiser des press tours à Las Vegas avec putes remboursées sur présentation de la note (du moins, il parait, de toute façon, ils vont bientôt crever...), de se rapeller t'avoir croisé dans le marais (alors que toi pas mais bon), te faire des bisous à la fin de leurs mails... Reste un coté moins reluisant, bien plus vicelard. La presse jeuxvideo vit principalement de la pub, de la pub jeux video. Il n'est pas rare de recevoir un coup de fil du bureau des commerciaux, qui ont eux même reçu un coup de fil d'un éditeur fort insatisfait des dernières rumeurs colportées ou des dernières notes mises, et qui menace donc, si on n'y remédie point, de supprimer la campagne à X mille euros qui devait avoir lieu... Un autre type de pression à base de marche ou crève, plus question de nous acheter à coup de soirées ou de goodies...
@Haru : Ce genre de choses, ce n'est pas nouveau, et ça ne se limite pas à la presse jeux vidéo.
Ce qui est nouveau, c'est que des mecs qui passent leur temps à relayer Kotaku et à écrire des pubs déguisées en critiques se prétendent "journalistes" et profitent de tous les avantages de ce métier sans en respecter les règles d'éthique les plus basiques.
Que les éditeurs tentent de séduire les journalistes, qu'ils menacent de retirer leurs pubs, c'est normal. Ca fait partie du jeu.
Que les journalistes laissent leurs couilles à la maison au fond d'un tiroir et passent leur temps à remuer la queue en espérant qu'on leur filera un nonosse, ce n'est pas normal.
Je n'ai pas acheté Amusement parce que j'ai trouvé assez limite le renommage de "I play videogames but I have a social life" en "Amusement Magazine" sur Facebook. D'ailleurs je ne suis pas le seul, plus de 100 personnes ont quitté le groupe dans les 3 jours qui ont suivi ce renommage.
Oui, je sais, c'est pourri comme raison.
Par contre pour l'instant j'aime bien IG, que je n'ai pas fini de lire.
@tentacleboy : Le problème c'est que les couilles ça se ménage. On les sors plus régulièrement qu'il n'y paraît en cas d'abus manifeste, on les garde pour le moment en ce qui concerne le jeu casual : une volonté éditoriale venue du dessus veut en ce moment qu'on note différemment les jeux casual des jeux "normaux", et même qu'en ce moment jeux actu cherche un rédacteur pour s'occuper des test casual, sous entendant qu'il faudrait un barème différent pour ceux jeux que pour les autres. Mais le faux débat a déja eu lieu : le casual gaming et le jeu casual n'existent pas, par contre, le casual gamer lui est bien une réalité (celui qui joue peu ou occasionellement). Par glissement sémantique et volonté de créer des marchés partout, certains ont cru qu'ils leur fallait des jeux spécifiques (des casual games) alors que comme le disait mon rédacteur en chef, atteré qu'on veux réorienter le site où je bosse vers le casual, les références du jeu casual restent avant tout... des bons jeux objectivement. En termes de mécaniques de gameplay et de réalisation (Mario Kart, Les Sims, Wii Fit, Kawashima...) qu'on aime ou pas subjectivement. Mais l'étiquette casual n'est qu'une étiquette de plus déconnectée de la réalité. Faudra que je fasse un papier sur le sujet.
Bref tout ça pour dire que si un rédacteur sort tous les jours ses couilles de chez lui, il va finir par les ranger dans sa poche pour rentrer chez lui avec et les amener visiter Pôle Emploi pas longtemps après. C'est con mais c'est mécanique. Les enjeux commerciaux dépassent la passion. Je dis pas que c'est bien, je dis que c'est comme ça.