Xenoblade rase de près
Par Game A le 31 août 2011 - Now playing.4 minutes
On pouvait s’attendre, en attaquant l’ascension d’un dieu grand comme un continent, à des paysages grandioses, quelques scènes épiques et un long voyage. Ce que propose effectivement Xenoblade Chronicles.
Mais le monument de Monolith Software a bien d’autres choses tout aussi intéressantes à offrir : ses commérages.
Les rues de la neuvième colonie, à la botte du dieu éteint, bruissent en effet de bavardages et d’indiscrétions, et discuter avec chaque PNJ n’a sans doute jamais été aussi passionnant, pour peu qu’on aime les potins.
On ne fait d’ailleurs pas que surprendre les rumeurs (Monica et Erik qui se retrouvent le soir au lieu d’être à leur poste, untel qui rentre tard, ou qui est très sévère avec son enfant…), on participe très vite à leur développement en effectuant un nombre assez incroyable de corvées pour un peu tout le monde, prétextes à explorer la vaste carte ou à combattre des ennemis.
Un sociogramme s’enrichit ainsi progressivement, traçant les triangles amoureux et les relations entre les habitants. Tout est scripté évidemment, hormis quelques occasions moralement gênantes (aider un soldat à tricher dans un combat ou choisir à qui administrer un philtre d’amour, à la jeune femme amoureuse d’un homme dédaigneux, ou à son rival éperdu), mais la ville reste un théâtre fascinant d’affinités et de répulsions.
Xenoblade Chronicles devait au départ se nommer Monado : Beginning of the World (du nom de l’épée surpuissante que le héros manie) : si mes souvenirs de terminale ne me trahissent pas, les monades (chez Leibniz en tout cas) sont ces sphères parfaites, autonomes, « sans portes ni fenêtres », qui composent l’univers et ne communiquent entre elles que par la grâce de Dieu. Pour un jeu qui prend tellement de soin à inscrire chaque personnage dans un subtil tissu de dépendances sociales (les relations sont aussi prises en compte au sein de l’équipe du joueur), le paradoxe est amusant.
Tetsuya Takahashi, le réalisateur du jeu, voulait en effet « que les joueurs aient le sentiment de se battre pour un monde peuplé de gens très différents », et c’est tout à fait réussi. Le résultat a étonné jusqu’au scénariste du jeu, Yuichiro Takeda :
Quand je travaillais sur le scénario, je pensais au genre de village que l’on voit dans les jeux de rôle habituels. Cependant, en jouant effectivement au jeu, je me suis rendu compte qu’il y avait tant d’idées dans ce seul village qu’il aurait pu servir de décor au jeu entier.
Takeda est en-dessous de la réalité : la richesse de ces microfictions fait regretter le tsunami d’un scénario, qui fracasse et emporte ce qu’il y avait de plus délicat, de plus soluble dans le drame : j’aurais préféré me consacrer uniquement à l’histoire d’amour naissante entre Sonia et Dean (ou espionner les faits et gestes de tout le monde), plutôt que partir en quête de revanche.
Chaque PNJ important a sa maison. En connaissant leur routine (« time active »), on peut les suivre jusqu’à leur porte. Juste comme ça hein (Peppino par exemple, il habite dans la première maison à droite en entrant dans le quartier résidentiel).
Le jeu a malheureusement tendance à écarteler le joueur entre la poursuite du fil de l’histoire principale, le combat des « homz » contre les envahisseurs venus du dieu d’en face, et le développement du sociogramme, d’autant plus que certaines mini-quêtes sont limitées dans le temps.
La frustration dans un RPG, ce n’est pas nouveau : le mécanisme même du levelling en génère (pour continuer l’histoire, il faut vaincre tel monstre, mais pour le battre, il faut s’entraîner longtemps sur des ennemis plus faibles). Ici, c’est un peu différent, on craint de manquer une liaison importante du sociogramme à aller trop vite (pas juste une arme ou une statistique à 100%), mais à être trop serviable, on se désintéresse du scénario général (d’autant qu’à discuter avec les PNJ, on évente rapidement le premier twist du jeu).
Arrivé à 50 heures de jeu, je suis parvenu à un point d’équilibre qui ne présage rien de bon pour la suite. A passer tant d’heures à faire le bon samaritain, je me suis détaché de la quête du héros, tout en me dégoûtant aussi du métier de factotum : mon goût pour les gossips atteint ses limites, surtout vu le temps que l’on met à gagner en popularité, dans la colonie 9 comme dans les autres (moins intéressantes) villes du jeu.
En fait, je crois que je suis mûr pour abandonner Xenoblade et aller jouer à Animal Crossing…
Xenoblade Chronicles, le jeu que les Américains nous envient, est sorti le 19 août sur Wii. Tout y est très bien, très carré, très beau. Les images proviennent de jeuxvideo.com.
Commentaires
Ca à l’air chouette, effectivement :) C’est rassurant de voir qu’il y a encore des RPG “à l’ancienne”, non pas dans le sens “c’était mieux avant”, mais dans le fait que ce genre de RPG est travaillé en profondeur, en proposant un système dont on n’est pas certain du succès. Juste pour tester et innover. Pas comme nombre de nouveaux RPG, trop lisses.
50 heures depuis le 19 août quand même, petit coquin.
Très impressionnant.
La peur de rater quelque chose me gâche aussi les RPG. Au moindre doute, je jette un oeil à une soluce. J’ai pas envie de refaire des donjons ou de rater tel évènement qui m’obligerais à recommencer le jeu ou à le finir frustré.
C’est tellement typique des RPG japonais, que je me demande si les joueurs de là-bas ne tirent pas une certaine satisfaction de ce genre de complétisme punitif. Je me souviens d’un truc pervers avec des coffres à ne pas ouvrir dans FF12 sinon on avait jamais un certain objet.
Et bien sûr, rien dans le jeu ne te prévient ou ne l’explique.
Des fous je vous dit. Moi, je ne fais plus aucun JRPG sans soluce.
+1, Game B, ça me fait la même chose. Les “vrais” RPG me rendent limite névrosés quand il s’agit de farfouiller les moindres coins à la con.
@Game B : la lance du zodiaque. Sur les forums de Xenoblade, c’était la grande crainte, ils en parlaient tous.
Pour les 50h, j’ai été malade deux jours, ça compte ? é__è
@Game B :
ah oui , les coffres de ff12 a ne pas ouvrir pour avoir la lance du zodiaque , c’etait bien chaud . mais on pouvais quand meme l’avoir dans un coffre avec un taux d’apparition de 10% si on avais equiper le bracelet de cristal … pas mieux je pense XD
an tout cas , c’est aussi ma peur dans un rpg de louper une quete annexe limiter dans le temp . mais d’un autre cote , je trouve que jouer tout le temp avec un guide ca fait perdre une partie de l’experience de jeux .
ouais, je trouve aussi dommage de devoir jouer avec un guide, mais des fois c’est clair que t’as pas trop le choix… la seule fois ou je l’ai fait c’était sur Chrono Cross, pour pas rater de persos (enfin, t’en rates forcément il me semble, mais pour les choisir quoi…) , pour le scoffres de ff12 je crois qu’on m’avait prévenu (mais je l’ai même pas fini tellement l’histoire était inintéressante…), mais il y a PIRE: je me suis tapé tout Valkyrie Profile à l’arrache, et du coup j’étais incapable de le finir (genre tu peux même pas faire du levelling à la fin, c’est mort, faut tout te retaper…) , une bonne grosse frustration…
@Game A : Il n’y a pas de mal à se faire du bien. Et puis l’été c’est le meilleur moment pour se taper un RPG !
Valkyrie Profile.
L’archétype du jeu que tu ne peux PAS finir sans guide. À la fois frustrant et rassurant u_u” Un super jeu, ceci dit. Dans le genre, need un guide, y’a aussi FFX-2 (qu’il faut recommencer 2 ou 3 fois… mais j’ai arrêté au bout de la 4ème quand j’ai loupé UNE foutue discussion avec un foutu prêtre par les visiosphères à la con. Saleté ) …
Je rêve de jouer à Xenoblade sinon. J’ai déjà le poster affiché dans ma chambre *3* M’fait baver c’t’article, c’pas juste x)
Tout à fait d’accord. Je regrette quand même que la pression scénaristique soit inégalement gérée. Un excellent moment de réalisation et storytelling reste celui de l’évènement déclencheur (oui, je reste vague), où on se prend à courir comme un fou avant de se rappeler qu’on peut se téléporter… Pour découvrir qu’en fait non, l’option est désactivée à ce moment-là. Et plus tard, alors qu’on est censé être hyper pressé par le temps, on se retrouve avec 12 quêtes annexes à remplir et la même liberté d’action qu’en une période plus “calme”. Ok, Machin va se faire bouffer incessamment sous peu. Mais il attendra quand même que j’aie fini de collecter mes pommes.
L’aspect social est effectivement très intéressant. Dans l’idée, ça rappelle un peu Majora’s Mask. La différence entre sauver le monde et sauver ton monde, quoi.
(36 heures de jeu, Valée de l’Eppée)
Il est vrai que outre la quête principal, on à vraiment l’impression de gérer tout un univers.
Déjà que les pauses inventaires sont plutôt longues et les négociation avec le marchand pour le meilleur inventaire cassent parfois un le rythme, on nous rajoute la personnalisations des ces armes par des gemmes à incruster qui sont légions, nous procurant diverses bonus parmi lesquels on à du mal à choisir.
Cela force les retours en arrières et c’est pendant ces moments que je profite pour faire quelques quêtes.
Comme le dit Game B l’aspect social nous plonge dans un véritable Facebook virtuel nous parmi lesquels les habitants nous demandent de régler leurs problèmes. Les quêtes qui sont en général banal voir redondante à la longue trouvent quand même le moyen de se diversifier notamment en nous motivant à reconstruire tout une citée de part une suite de quête qui auront incidence sur l’aspect de la ville.
Enfin je conclurais juste en insistant que l’aspect social est évidemment présent chez les héros et même plutôt poussé puisque proposant un partage de compétence en fonction du niveau d’amitié et quelques cinématiques qui sont gadget si vous avez trop avancé dans l’histoire.
@Dosap : FFX-2, un RPG ? :D
@Pteppic : +1 pour Majora’s Mask. En plus y’avait comme une aura assez sombre et malsaine, je trouve, autour des gens de ce village… Ce que j’aimais bien, d’ailleurs, ça balançait un coup de sérieux en contraste avec l’humour parfois étrange. Puis c’était en concordance avec le masque de Majora lui-même : un personnage tragi-comique. Un vrai scénario en clair/obscur, je n’ai jamais retrouvé cette atmosphère super-intéressante dans les Zelda qui ont suivi. Dommage.
@Søren : Mmmh… un truc ressemblant vaguement à un RPG… enfin je l’aime bien quand même, système de combat, musique… Le côté Jpop est à chier mais bon…
Et Majora’s Mask, c’est sans doute un jeu unique….et j’imagine mal Nintendo refaire un truc semblable (pas très vendeur comme ambiance)… C’est dommage, parce que ce jeu fourmillait d’idées géniales… Y’a des gens avec des masques africains dans leur salon, moi je veux un masque Majora… u_u”
@Dosap : Rien que le principe d’étendre le panthéon du jeu au-delà des trois déesses, c’était super… Oni-link, quoi, enfin une forme classe pour le héros au torchon vert qui commence à mal vieillir. Puis la mise en scène, c’était du grand art. Il me semble que ce n’était pas Miyamoto qui avait réalisé celui-ci, mais juste supervisé. Je ne sais plus quel était le nom de son poulain, ni ce que celui-ci est devenu…
Ouah 50h de jeu, chapeau! Moi actuellement il me faut 25 semaines pour en arriver là ^^
C’est vrai que Xenoblade Chronicles semble effectivement être l’archétype parfait de ce qu’on appelle le “RPG à l’ancienne”… et qui s’adresse à un public très ciblé. Qui a du temps à investir dedans en tout cas quand on aime vraiment parcourir un jeu.
Parce moi, même sur Diablo je flippais ma race si je n’ouvrais pas tous les coffres et je massacrais pas le moindre rat histoire de ne pas rater un superbe loot… Alors si je tombe dans un RPG comme ça, je signe la mort de mon couple :D
C’est très intéressant, mais …
à quoi servent ces affinités avec les gens ?
augmenter des stats ?
@ganesh2 : Il s’agit de quêtes optionnels. autrement dis tu gagne de l’expérience et des items. Le fait que l’organigramme se remplisse est l’aboutissement de cette progression parallèle.
Lost Odyssey et son succès lié à l’ouverture de tous les coffres du jeu m’a d’ailleurs fait criser un sacré nombre de fois…
@Søren : Si on ajoute la course aux succès au reste, c’est clair que ça devient l’enfer. Si on a trop de choses à faire dans le bon ordre, c’est la liberté de jeu qui font les bons RPG qui disparaît :/
bonjour,
Effectivement Le sociogramme est une totale réussite, j’ai n’ai pas vu des PNJ aussi vivant dans un jeu jap depuis Majora Mask. J’en suis à 30h de jeu et Xenoblade est un très belle réussite.
Perso si je devais le comparer avec un autre titre ça serait GTA. En effet, Xenoblade réunit plusieurs gameplay mais en étant moins bon que les concurrents :
- Système de combat en dessous de FF12 (moins de choix, tout repose sur le level des personnages)
- Système d’objet me fait énormément pensé à One Piece Unlimited Cruise, (mais avec le coté aléatoire des orbes bleux qui fait défauts et le manque de Bestiaire !)
- le Sociogramme à la Majora Mask.
Mais à la différence majeur des autres “gros” JRPG de ces 10 derniers années (et c’est la que je comprends le avis dithyrambiques des testeurs) : Y’a une histoire, y’a des personnages charismatiques, l’univers lui même est classe (vivre sur le dos d’un géant), même le level design des régions est intéressant : la marais de nuit (tu chiales!) et je ne parlerais même pas de l’OST !!!
et je rajouterais juste une dernière chose à vos commentaires. La vrai qualité du jeu c’est qu’on prend PLAISIR à faire la quêtes annexe, ca me rappelle Okami, on a l’impression d’amélioré les choses, de reconstruire… et perso j’adore ce genre d’émotion que peut procurer un jeu.
@Game B : J’avoue, je ne suis pas fan du « Attention t’as loupé un truc super important impossible à récupérer autrement. » Rien de tel pour te dégoûter du jeu en forçant le joueur à recommencer le jeu 15 fois.
Le pire que je connaisse, dans le style, c’est The Last Remnant… Jamais je n’ai autant détesté un RPG. Impossible de connaître l’ordre parfait des quêtes sans recommencer 25 fois le jeu (des dizaines d’ordres possibles, sans pouvoir revenir en arrière, ni effets immédiat pour reload), et encore, juste pour le CD1. Ca, ajouté à un gameplay en mousse…
Et je précise que The Last Remnant est tellement pourri qu’il est quasiment impossible de trouver un guide complet et potable. Les pros ont dû jeter l’éponge bien vite…
Ah ben voila qui résume tout à fait mon ressentit par rapport au jeu ! Je n’osais lire l’article avant d’avoir assez avancé par moi-même pour ne pas me gâcher le plaisir de la découverte, mais après 30h, je me retrouve beaucoup dans ce qui est écrit ici.
Le jeu déborde de bonnes intentions, regroupe à peu près toutes les bonnes (et quelques mauvaises…) idées des JRPG de ces dernières années, mais le fait sans génie. Les potins m’ont lassé, aussi emmerdants que ceux de mes vrais voisins, les quêtes annexes manquent de panaches et globalement l’immonde niaiserie des dialogues est entrain de m’user la volonté. Pourtant, c’est agréable, généreux, dépaysant. Mais quelle superficialité… Ce jeu me fait penser à un bilan scolaire, du travail bien fait, appliqué, mais passable.