consolewar.gifJ’ai failli m’étrangler en lisant “On ne le dira jamais assez”.
Il faut dire que le travail éditorial de Game Blog est loin de favoriser la paix des ménages avec des émissions comme Versus, ou les ramassis de clichés sur les joueurs et le marché alignés dans leurs podcasts.
Le journalisme appliqué au jeux vidéo est-il vraiment bien placé pour nous donner des leçons de comportement ?

Pour l’interview citée (sans source), notre candide Jordan répond à une simple question avec un discours d’évidence qu’on ne peut que partager. Il ne fait pas vraiment avancer le problème, mais dit juste que le fanboyisme c’est la mauvaise foi justifiant un achat, et qu’”être méchant, c’est pas bien”. S’il faut absolument tirer quelque chose de tant de platitude, ce serait plutôt la question de “qui crée la Guerre des consoles ?”
Sont-ce les industriels, ou bien les joueurs ? Pour tout dire, les premiers s’en contrefoutent d’avoir la plus grosse (ce n’est pas les fanboys qui font le gros des ventes), et les seconds veulent juste en avoir pour leur argent (et au final savoir ce qui convient le mieux à leur goûts plutôt qu’approcher une vérité absolue). Et si c’était la poule qui chante qui a pondu l’oeuf ?

Le nerd de la guerre

A mon avis, l’origine des combats est à chercher dans un certain type de journalisme, qui s’occupe essentiellement de relayer à longueur de journée des dépêches sans intérêt, dans la grande courses au scoop et à “l’information en continu”. Sans aucun recul ni avis, ils relayent les coups de com’ du marketing et des départements Relations Presse des éditeurs de jeux vidéo.
Ainsi, de nos jours, si t’as besoin de faire parler de ton jeu, il suffit de déclarer que Nintendo est un con, et/ou que Microsoft c’est les meilleurs pour voir ta phrase relayée. Et c’est la flamme d’un débat stérile qui est rallumée juste à coté de ton nom, éclairant celui du jeu que tu veux vendre dans un mois. Hop, de la pub gratosse pour un peu d’huile sur le feu.
En excluant les branleurs du marketing et des RP, il faudrait alors peut-être un peu moins se demander “à qui profite la guerre” que “à qui profite les histoires de la guerre”.
Qui est-ce qui est payé pour faire passer un simple divertissement pour une guerre de tranchée ? L’actualité vidéo-ludique est-elle tellement soutenue qu’il faille absolument une vingtaine d’entrée par jour dans le flux RSS ? A-t’on vraiment besoin de savoir les derniers chiffres de vente de Super Mariole ? Que doit-on en déduire ? Qu’il est mieux parce qu’il vend plus que les autres ?
S’ils n’en fournissent que les munitions, les marchands d’armes ont quand même leur responsabilité dans les guerres…
Pour ma part, je suis sûr que s’il y avait une presse payée pour parler de l’actualité des dentifrices, on aurait des fanboys Signal contre des extrémistes Colgate dans toutes les salles de bain.

JulienChé Guevarra

Si les “journalistes” du jeu vidéo défendaient vraiment les joueurs, au lieu de servir de relais Relation Presse payés en petits fours et copies promotionnelles dédicacées, on aurait moins de querelles de clochers et des jeux beaucoup moins chers.
Les magazines et autres sites d’actualité video ludique devraient taper des scandales à chaque nouveau DLC hors de prix, au lieu d’un hypocrite “n’en achetez plus si vous voulez que leur prix baisse”. Des développeurs de jeux ratés dont on nous a matraqué les projets pendant des mois, pour finir avec des pétards mouillés (Dark Siders, Saboteur) devraient être mis face à leurs promesses à travers une analyse d’un processus de travail qui les a, une nouvelle fois, conduit dans le mur.
Au lieu de ça, non. Il faut à tout prix relayer la dernière petite phrase de Reggie ou Peter. Rien à foutre du jeu et de l’argent des joueurs du mois dernier. Et s’il faut faire des analyses de marché, des rédactions comme celle de Gameblog préfèrent remettre en cause les joueurs, en les sommant d‘“acheter Madworld ou il n’y aura plus de jeux pour les gameurs” ou de ne plus pirater les jeux DS. Mais à aucun moment on entend parler du droit du consommateur au regard de l’argent investi dans des jeux qu’on nous fait payer plusieurs fois (Retrogaming), par petits bouts (DLC), ou le double du prix d’autres pays. Et ensuite, face au dirigeants et créateurs, ce ne sont que complaisance et questions insipides auxquelles répondent autant d’informations que celles qu’on trouvera dans le premier dépliant Micromania venu.

Il y a deux types de journalisme, celui qui est du côté du peuple et des petites gens, et celui qui est du coté du pouvoir; qu’on appelle aussi Propagande. Dans les jeux vidéo, c’est pas bien grave finalement. Au pire, il nous reste Warpzone.
Mais la Presse actuelle et son avenir sont par contre des sujets sérieux et passionnants, qui ont été abordés dans un numéro spécial de Courrier International de juin dernier, et qui peuvent éclairer notre problème (l’impossible objectivité est un autre point notable).
Ci-après l’extrait d’un discours très touchant sur l’origine et le rôle du journalisme, surtout en temps de crise où il est bien plus confortable de rester en bon terme avec ceux qui prennent les sous qu’avec ceux qui les dépensent. Barabara Ehrenreich y explique que le journaliste ne doit pas appartenir à une élite, mais bien à la classe ouvrière :

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