Parmi les surprises de la vie du gameur, il y a celle de s'éprendre d'un jeu après l'avoir fuit pendant des années. Après Gears of War, qui m'aurait fait croire que je pouvait aimer les FPS (mais en fait non, ouf), me voilà accro à l'humiliation en caleçon made in Capcom.

C'est déïgueulassse
UGG (on va l'appeler ujéjé pour faire court), divise les foules. Aussi dur d'approche que son ancêtre, c'est un modèle à l'inverse de ce qui se fait habituellement dans le genre plateforme. Traditionnellement (Mario, Metal Slug, Contra), c'est le joueur qui à l'avantage de la maniabilité. Les ennemis viennent en ligne suivant des séquences précises, et au joueur de les éliminer de tirs en diagonale et autres sauts de cabri. Sur UGG, c'est les monstres qui ont tous les droits : ils réapparaissent inlassablement, à des endroits différents, passant au travers de la moitié du décor, et encaissant les coups en avançant jusqu'à la mort. Notre pauvre Arthur lui n'a qu'un saut parabolique immuable (impossible de changer la trajectoire une fois en vol), n'a droit à aucun tir en biais, ne peux pas tirer ou sauter depuis une échelle, se fait projeter à trois mètres (et souvent dans un trou) au moindre contact, ne peux effectuer que deux tirs à la fois, et j'en passe.

Don Quishoot
Arthur, malgré tous ces défauts, sauve le jeu. Parce que c'est quand même le Buster Keaton de la plateforme. Son saut, parfaitement retranscris sur l'excellent dessin (de l'ancien gars qui designait les KOF) de la pochette, est symbolique de la pantomime de l'avatar du joueur : comme mu par l'énergie du désespoir. La course du chevalier, avec ses longues jambes en extension et ses bras cherchant le maximum d'élan, nous met dans la peau d'un fou quixotien courant après ses moulins. Mais c'est vers une centaine de morts certaines qu'il entraine le joueur, rien que pour abattre le premier stage. Et vu l'ampleur de la bataille qui attend le joueur, notre héros doit y croire pour deux. Au moins.

Humilier mais gentiment, régulièrement, obstinément, systématiquement...
Dans UGG, tout est contre le joueur. On ne tient pas longtemps en équilibre d'un pied au bord d'un plateforme. Les ennemis ont tout à fait le droit d'apparaitre sur votre tronche. Bref : si on est pas sûr des priorités, c'est le joueur qui morfle.
Depuis l'original, ça s'est un peu adouci : on renait là où l'on est mort. Mais si il y a un monstre à cet endroit, on re-meurt bien sûr. Et si on tombe dans un trou, fini la belle vie on recommence à la dernière plateforme dûre. Dûr, pour les stages de haut vol dans les nuages et sur la lave. On a plus de vie aussi : les armures tiennent deux attaques contre une dans les années 80. Tout ce qui fait que, plus qu'avancer, on rampe de stage en stage. Mais au moins on avance, c'est déjà mieux qu'avant.

Ghoul Rising
L'ajout majeur au gameplay, c'est aussi ce petit lorgnage vers le genre des Castle-roïds. On récupère des armes qui nous changent la vie et la mort comme le double-saut, le bouclier volant, et autres magies de protection. Des sceptres, à trouver-bien cachés, vont permettre de voyager d'un niveau à l'autre pour récupérer des objets maintenant accessibles. Le jeu reste donc linéaire, mais le refaire plusieurs fois augmente les chances.
...
Hé, mais ça me rappele un truc. C'est le principe de Dead Rising cette affaire. On commence par se faire submerger, on rampe, on insiste, on gratte, mais on finit par maitriser et devenir le roi de cette petite montagne de folie.

Superplay or Die
Traumatisé peut-être, mais par moment UGG me rappelle Guitar Hero. Passer un stage signifie ici aussi garder un rythme précis, fait de mémoire tant que de réflexes. Tous ces recommencement de début de niveau vous poussent à la course parfaitement, celle où les yeux et les mains paraissent directement reliés; évacuant les interférences des doutes cérébraux. Vous êtes alors dans l'état légendaire du gameur : LE SUPERPLAY.

UGG c'est le manic platform, l'équivalent de ce qu'est le manic shooter au shoot'em up. Ce genre de jeu de tir affichant des rideaux de balles, qui est devenu la survivance d'un genre déchu. Mais c'est le système de sauvegarde régulière et les stages courts qui font supporter tous les malheurs de notre chevalier. Contrairement à Sonic et Moustache, on est pas là pour courir et sauter à travers de grands stages vides. Ici l'espace est réduit, claustrophobique, chaque pas est calculé, chaque saut est une prière, chaque tir doit toucher, chaque nouvelle arme prise par inadvertance peut vous coûter la vie. On en vient à rire de voir le jeu si salaud, mais la moindre victoire est indiscutable et la gloire est au bout du chemin (et on nique la princesse à la fin NOUS !).