En dehors de la mauvaise foi, qu'est-ce qui fait voler les manettes depuis 25 ans ? Un niveau de difficulté, plus présomptueusement appelé Intelligence Artificielle, mal dosé. A qui la faute ? (à part l'appendice filaire qui subit les outrages de la gravité). Est-ce le jeu qui doit s'adapter au joueurs, aussi différents puissent-ils être ? Ou le joueur qui doit mériter son plaisir en s'adaptant au jeu ? Au lieu d'une réponse précise, quelques divagations éthyliques sur le sujet...

A l'époque, j'ai abandonné le superbe Grandia sur PSone après quelques heures. Tout était parfait : des dessins-animés japounés, des personnages attachant, un système de combat dynamique à base de jolis sprites. Mais même en insistant, impossible de perdre un combat. J'étais fort et mes XP montaient, mais l'absence de challenge me coupait mon plaisir.

Tout flatteur vis au dépend du joueur
Parce qu'un jeu, c'est un monde pour nous flatter. Nous faire croire qu'on est le seul à l'expérimenter, que l'histoire gravite autour de nous, et qu'il faut être un précieux et unique flocon de neige pour réussir toutes ces épreuves. On peut perdre une ou deux fois, mais jamais plus d'affilée. On peut se prendre la tête sur une énigme, mais pas plus de deux minutes. Pour que la lèche de nos fesses marche bien, il faut donc que le jeu ne soit ni trop facile sous peine de déjouer la supercherie, ni trop dur sinon on se sent rabaissé par un produit que c'est MOI qui l'ai payé alors un peu de respect machine de m...

L'habitude
J'aimerais pas être le développeur responsable de cet aspect décisif d'un jeu. Soit on s'adapte au joueur cible du jeu. Pour Bob l'éponge Le Jeu, on va faire du gentil facile. C'est des gamins de huit ans qu'il faut faire mousser, allons-y molo. Pour Street Fighter, on a affaire à des ceinture noires qui sont sur la série depuis quelques années. Guile n'aura plus besoin de 2 seconde en arrière pour déclencher son Sonic Boom. Soit on demande au joueur de s'adapter au jeu, en maquillant les premiers niveaux en tutoriel pénible. Assumant qu'après ceux-ci, on mets la plupart des joueurs (ceux qui ont tenu) au même niveau.

Les alternatives
Dans la pratique, ces deux cas sont relous. On ne devrait pas souiller le cerveau des enfants avec des licences pourries, et on devrait pas se taper des tutoriels qui sapent tout le travail d'immersion artistique du jeu. On peut donc proposer au joueur de choisir lui-même son niveau de difficulté avant de lancer une nouvelle partie. C'est une solution encore très populaire, mais toujours aussi ambigüe. On lance notre jeu tout frais, et on nous demande si on est nul (niveau facile), quelconque (niveau normal), ou un pur ouf rebelle (difficile et plus). Mais surtout, comment juger de la difficulté avant même d'y avoir joué ? C'est malin ça, tiens...
Ainsi un Megaman Zero n'a pas la même difficulté qu'un Rayman. En mode normal, le premier vous fera pleurer de rage pendant que le deuxième vous fera dormir d'ennui. God of War propose de changer le niveau de difficulté en plein cours de partie si on perd trop souvent au même endroit. Dommage qu'il ne propose pas de passer au niveau supérieur quand on est trop fort (comme moi, bien sûr).

Manipuler le joueur
La difficulté la mieux gérée de ces dernières années reste, à mon avis, celle de Resident Evil 4. Parce qu'elle est psychologique. Les épisodes précédents mettaient la pression en vous faisant crever régulièrement tout le long du jeu avec des passages plus ou moins durs. On finit par tout esquiver et garder ses balles pour le boss. Bonjour l'ambiance...
De ce point de vue, le 4 est beaucoup plus facile; mais il commence très mal. Après la cabane dans les bois façon Evil Dead (tutoriel discret), c'est le traumatisme du premier village. Rarement, voir jamais, le jeu sera ne aussi difficile, mais cette sensation marque le joueur. C'est ce souvenir qui mettra la pression sur Léon, sans pour autant lui faire subir maintes outrages. On meurt beaucoup moins que dans les autres épisodes de la série, pourtant c'est l'épisode où l'identification du joueur est la plus forte. On a trop peur de se faire retronçonner la tête dès qu'on entend les accents hispaniques de nos poursuivant.

Et vous lesquels de vos jeux ont été gâchés par une mauvaise gestion du niveau de difficulté ?