Haut de la publicité English Training
En attendant que Elite Beat Agent traverse l’Atlantique, pas grand-chose d’autre à se mettre sous le pouce que English Training. Moi qui pensais avoir une console de jeux, je me retrouve avec une resucée chiante de Victor. Ah zut, ça c’était ma conclusion ; Brain Training a tellement accéléré mon cerveau que je brûle les étapes. Revenons au début.

Jouer à English Training est une série d’épreuves. La première, supporter sa publicité, désagréable, comme souvent chez Mario : “Votre console parle mieux anglais que vous”. Ca commence bien. Si c’est un défi, franchement, je m’en fous ; elle parle peut-être mieux anglais que moi, mais ici on parle mieux français que les publicitaires de la marque, c’est toujours une consolation.

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Et puis c’est quoi cette façon d’agresser les potentiels clients ? On cherche à nous culpabiliser ma parole[1]. Ca me rappelle que Sébastien Bohler, dans une chronique pour l’émission Arrêts sur images, rappelait que dévaloriser certaines personnes les pousse à l’achat. A qui s’adresse d’ailleurs expressement le “jeu” ? Harmony, une hystérique de 19 ans et Cyril, 26 ans, arrivé déjà à son niveau d’incompétence, puisque “fraîchement” engagé dans une “grande entreprise internationale” sans être bilingue. Je bisque toujours autant de n’être plus la cible marketing privilégiée de N., alors que je lui ai sacrifié mon argent pendant toutes mes jeunes années mais bon, vu la qualité du cheptel ciblé par Mario…


Malgré tout, je veux quand même l’acheter. Seulement 30 euros en plus. Mais là, nouvelle épreuve : la jaquette est affreuse, bon sang ce que c’est maussade ; les petits bonshommes rigolos de la version japonaise ont fait pschitt ; à la place reste une pyramide qui fleure bon la vie active, sur fond gris. Pour quelle signification en plus… Promesse d’arriver au niveau 800 du TOEIC ? (Au fait, les informations de la pub sont toutes fournies par ETS, les concepteurs du test ; je dis ça comme ça hein). Mais bon, décidément aujourd’hui, je ne doute de rien, allez j’y joue.

Perfectionner son anglais tout en s’amusant mon cul. C’est chiant, et toujours aussi triste. 1700 dictées, idiotes (la voix féminine du jeu qui vous dit “my name is ken”) et faciles. La difficulté provient surtout de la reconnaissance des caractères, le “p” notamment - bon et parfois de leur foutue prononciation Get up devient guésseupe.
Le vrai problème, c’est l’ennui, encore renforcé par le rétro triste des illustrations. Alors bien sûr, il y a quelques “jeux”, une dictée “sprint” et un jeu “antisouris” (laissez tomber…) qui ne mesurent que votre capacité à adapter votre écriture au logiciel. Et puis des mots croisés (11 seulement !) trop faciles. Mais là, avouons, Nintendo n’est pas responsable de leur manque d’intérêt : l’anglais a tellement emprunté au français, et plus tard au grec et au latin, que 8 fois sur 10, vous avez des intitulés de ce type à élucider : “original”, en anglais ? Je vous aide, c’est en 8 lettres.

Bon, si niveau jeu, pas d’extase, est-ce au moins efficace ? Ben c’est douteux. J’ai demandé à des profs d’anglais, des vrais, des honteux, si la dictée était vraiment un “moyen très efficace pour apprendre une langue”. Ils m’ont répondu que c’était surtout efficace pour restaurer le calme dans une classe - ou pour remplir une heure de cours non préparé.
Revenons au niveau 800 du TOEIC. Le jeu classe le poulet selon 9 niveaux de compétence. Le deuxième jour, j’étais monté au AAA, juste avant le meilleur ; la veille, j’étais au plus nul. Mais là n’est plus le troublant : par exemple, le niveau A, donc le 6e en partant du plus mauvais, vous gratifie d’un “vous vous débrouillez assez pour comprendre un touriste qui vous demande son chemin”. Après vérification sur la grille d’interprétation du TOEIC, “comprendre de façon limitée certains événements courants avec un interlocuteur habilité à dialoguer avec des personnes qui ne sont pas de langue maternelle ” correspond au niveau élémentaire du TOEIC : le 4e meilleur niveau d’English Training ne correspond qu’à l’avant-dernier du TOEIC (sur 6). Bizarre, quand English Training semble promettre le niveau TOEIC 800 (“opérationnel supérieur” pour ETS), de voir que 6 classes sur 9 plafonnent à maximum 400.

Et puis dernière mesquinerie, même pas de Game & Watch caché, comme dans Kanji Sonomama Rakubiki Jiten. E.B.A a intérêt à exploiter mes nouveaux pouvoirs linguistiques, j’aurais vraiment l’impression d’avoir été puni pour rien sinon.

Notes

[1] Bêtement en plus, car avec à l’incompétence de Nintendo, Sony, Sega à importer vite et bien les bons jeux de leurs consoles, il y a belle lurette qu’on est devenus très bons en anglais, et même en japonais.