Avec une fournée de cinq nouveaux jeux, Nintendo a dépassé ce matin les cent DSiWares disponibles sur la plateforme européenne. 

Pas si mal pour un service ouvert il y a moins d’un an, et excellent moment pour tirer un premier bilan de la dématérialisation pour console portable selon Mario.

Le prix

Les 103 « jeux » se répartissent comme suit : 34 jeux à 200, 41 à 500 et 26 à 800 (il y en a un 104e disponible au Royaume-Uni, édité par EA à 500 points). On regrette évidemment qu’il n’y ait que deux applications gratuites (le navigateur internet et Flipnote studio) mais venant de Nintendo leur existence même était quelque part déjà inespérée.


Répartition du prix des DSiWares européens.

L’essentiel de l’offre coûte 500 points (5€) ce qui, au vu des jeux concernés et de leur durée de vie, est un très bon prix. 

Si on regarde maintenant la répartition des sorties de jeux durant l’année, on distingue assez clairement deux périodes, la première finissant en septembre, l’autre commençant à partir d’octobre.


Nombre et répartition des DsiWares par mois.

Le mois de septembre clôt de manière bien symbolique les six premiers mois de la machine : seulement quatre sorties durant le mois entier (dont deux applications, le squelettique dictionnaire 6 en 1 et un logiciel de photo, MySims Camera). Pour les deux restantes, outre un jeu déjà sorti à l’identique sur Wiiware (Yummy Yummy Cooking Jam édité par Virtual Toys), Nintendo proposait un Solitaire 2 en 1. Très symbolique, comme je disais.

À partir d’octobre (et après une opération de com en septembre), la machine se met en marche et le volume des sorties augmente, avec un pic assez logique en décembre. Le plus grand nombre de jeux à 800 points indique sans doute que l’affaire peut devenir assez rentable pour les éditeurs.

Si on lit la liste des jeux, il apparait cependant que ce nombre de jeux conséquent est pour partie un trompe-l’oeil : quand Nnooo propose son journal intime en trois couleurs de couverture (!) qui sont autant d’applications DSiWares à 200 points, Nintendo rentabilise au maximum Faites de la magie, ses Jeux indémodables et Electroplankton (précédemment sortis sur DS) en les découpant en respectivement 6, 4 et 10 applications.

En fait, sur 103 jeux, près de la moitié sont des reprises totales ou partielles de jeux déjà sortis sur DS (même si ce n’est pas forcément un mal : on a pu profiter de Zombie BBQ ou Sujin Taisen : La guerre des chiffres qui n’avaient pas été distribués en Europe). Ajoutez-en encore quelques-uns venus de l’iStore et le déjà-vu règne. La prise de tête aussi puisque c’est le type de jeux le plus représenté dans le catalogue : plus d’un tiers d’entre eux peut se ranger dans cette catégorie, dont une petite dizaine de jeux de cartes et 6 sudokus.

La visibilité

Difficile de faire son choix dans cette masse de jeux déjà vus ou d’utilitaires (15% de l’ensemble). Mi-janvier Nintendo avait juré craché qu’ils allaient lancer une campagne de publicité au Royaume-Uni pour promouvoir le WiiWare et le DSiWare. Sauf erreur personne n’a rien vu venir là-bas.

Pour les joueurs le premier problème est de toute façon l’absence d’un planning publié à l’avance, point sur lequel Nintendo Europe n’a en rien progressé : il n’est pas rare d’ignorer le jeudi matin ce qui va sortir à minuit (heure hebdomadaire de mise en ligne des nouveaux produits) ! Quant à leurs annonces semestrielles de sortie, on attend toujours Pop Island (du studio qui a développé les deux Glory Days) et Reflection présentés en septembre… Par ailleurs, quand Mario daigne sortir un jeu, il continue de le faire dans un silence radio impressionnant (j’en ai déjà parlé à propos de Reflect Missile).

La boutique n’a pas changé non plus. Y faire ses courses est toujours aussi long et aléatoire (images lilliputiennes et description des jeux trop succincte et générale). Heureusement que les quatre dernières sorties sont affichées sur la page d’accueil ; les retrouver dans les méandres de l’arborescence n’étant pas une partie de plaisir (comme le dit le boss de Q-Games après avoir acheté les jeux qu’ils ont développé sur sa DSi fraîchement acquise : « the DSi store is hell to navigate eh… how does anyone find anything? You have to know beforehand exactly what you want »).

On peut remarquer à ce propos l’irrégularité du volume hebdomadaire de sorties. Outre la (compréhensible) fournée de six jeux proposés à la sortie de la console (on remarque tout de même que la semaine suivante rien n’était proposé ; n’aurait-il mieux pas valu « lisser » l’offre ?), Nintendo a dépassé par trois fois les quatre jeux par semaine : les 18 et 25 décembre (semaines 38 et 39 sur le graphique) et aujourd’hui même, 25 février (semaine 48).


Nombre de jeux par semaine (abscisse) depuis le 3 avril 2009.

En sachant qu’au-delà de quatre, les nouveautés ne s’affichent plus sur la page d’accueil, les éditeurs concernés ont dû l’avoir mauvaise (les perdants en décembre étaient apparemment Nnooo avec la déclinaison verte de son bloc-notes et Gameloft avec Me and My Dogs Amis pour toujours).

Et puisqu’on parle des éditeurs…

Les éditeurs

Nintendo est évidemment le plus présent sur sa plateforme de téléchargement avec 58 applications en ligne à ce jour réparties comme suit : 2 gratuites, 25 à 200 points, 24 à 500 et 7 à 800.

Loin derrière arrive ensuite Gameloft avec 11 jeux en Europe, dont 2 à 500 points et 9 à 800 points (il faudrait ajouter Uno qu’ils ont développé mais qui est édité par Nintendo à 5€ chez nous). Derrière on trouve parmi les grands noms Hudson (5 jeux, 4 à 5€ et 1 à 2€), puis Nnooo et Electronic Arts avec 4 jeux chacun (5 pour EA au Royaume-Uni). Ubisoft et Activision ont également pris l’eau du bain, sans s’y attarder.

Pour l’essentiel les DsiWares sont donc alimentés par Nintendo et Gameloft (aucune idée de ce que valent les jeux de ces derniers - Castle of Magic est parait-il très bien). Ce dernier éditeur est également extrêmement dynamique sur le marché américain (où ils ont notamment sorti une adaptation d’Oregon Trail, ce jeu éducatif rendu célèbre par ses causes de game over - dysenterie, diarrhée, choléra…) et a au moins le mérite d’une communication un peu plus professionnelle que le gros :

une jolie fille en mini-short (elle s’appelle Jane) pour vendre Uno sur WiiWare, ils ont tout compris…

Un succès ?

Il y a quelques jours Nintendo a révélé quelques résultats économiques du WiiWare. La démarche est tellement inédite provenant d’eux qu’elle a sans doute un rôle de méthode Coué à ne pas négliger. Rien de tel pour le DSiWare malheureusement, mais on peut tabler sur un succès plus franc : si début janvier Arkedo n’avait « toujours pas de preuve que [le WiiWare pouvait] être rentable », ils avaient par contre entendu des « échos [qui] disent que c’est pas si mal » (Gamekult). 

En prêtant attention aux classements des ventes DSiWares entre août et octobre (liste partielle), on remarque en effet que les titres d’éditeurs tiers peuvent se maintenir assez bien sur de longues périodes (Asphalt 4, Oscar in Toyland), surtout les moins onéreux (MySimsCamera d’EA a durablement détrôné Mario vs. Donkey Kong en septembre, les blocs-notes de Nnooo ont bien fonctionné aussi parait-il).

Du point de vue des joueurs maintenant, à la veille de la sortie de la DSi XL, la question parait encore plus cruciale. La réponse n’est malheureusement pas évidente non plus.
Personnellement, si j’ai adoré les titres de Q-Games (Intersect, Reflect Missile, Starship Patrol), que j’attends avec impatience leur prochain, Dark Void Zero et Pop Island, il ne me viendrait pas l’idée de conseiller à quelqu’un de basculer sur les DSi. C’est sans doute le plus triste et le plus grave pour cette plateforme de téléchargement.