Stage select
Par Game A le 5 mars 2009 - Ça dénonce grave.4 minutes
Oui Street Fighter IV (SF4) est beau, bien pensé, une vraie claque. À force d’y jouer, même la chanson d’Exile finit par être entrainante, c’est dire.
Une seule chose ne passe vraiment pas en fait : les décors.
Outre leur faible nombre (17 dont un décor vide et 4 variations), le plus décevant vient de leur impersonnalité.
À l’évidence il s’agit d’un mauvais choix des développeurs plutôt qu’un défaut de conception : ils ont choisi de partager les décors de Street Fighter IV entre tous les personnages au lieu d’en créer spécialement un par personnage.
On voit les avantages de la démarche : en désolidarisant personnages et décors (sans parler des musiques), on peut baisser le nombre de ces derniers. Cette solution de facilité a dû soulager pas mal de graphistes quand les jeux de baston surenchérissaient constamment dans le nombre de personnages jouables.
Sauf que la flemme a un prix : elle privilégie exclusivement la fonction esthétique du décor.
Dans tous les Street Fighter jusque là (SF Alpha, qui déclinait deux fois le même stage, et SF The Movie exceptés), chaque personnage avait son décor et sa musique propres. La pratique semblait si évidente que, dans SF2, les trois avaient été liés “organiquement” : la vitesse d’exécution des musiques changeait selon la barre de vie de l’adversaire (c’était même assez pénible), et certaines animations du décor ne s’enclenchaient qu’après le match (dans le stage de Fei-Long notamment).
Les développeurs avaient saisi qu’un décor et sa musique, bien loin de “seulement” donner un cadre et une cadence à l’action, étoffaient la personnalité du personnage auxquels ils étaient exclusivement destinés. C’était d’autant plus nécessaire que les scénarios étaient peu mis en valeur (ou idiots) et que les catchphrases étaient minimales (une seule par personnage dans SF2, et même aucune dans SF1).
Je dis “étoffer”, cela reste bien sûr souvent limité : le décor et la musique fournissent ainsi d’abord des informations redondantes, connues par ailleurs (ne serait-ce que par les autocollants sur la borne d’arcade).
En premier lieu la nationalité de l’adversaire, symbolisée par quelques monuments célèbres et au prix de quelques stéréotypes plus ou moins justes (vélos à Pékin, gondoles à Gênes - sic). L’utilisation de ces symboles dépasse cependant la seule indication géographique.
Par exemple Mike, de Street Fighter 1. En rouge et bleu devant le mémorial national du mont Rushmore, sa psychologie s’enrobe irrésistiblement d’une coloration patriotique, voire d’un désir de rêve américain et d’aspiration sociale.
Inversement, la dimension de racaille minable de Birdie n’apparait nulle part mieux que dans son décor, une sordide latrine de pub (Street Fighter Alpha 2, image).
Le décor peut aussi informer sur la profession de l’adversaire : ouvrier pour Zangief, police pour Chun-Li. Pour cette dernière, la présence (jusque dans la musique) des klaxons de vélos modère sa fonction d’agent d’interpol indiquée par le scénario : plus prosaïquement, elle semble d’abord faire la circulation (on dira qu’il s’agit d’une couverture).
Niveau de Chun-Li, Street Fighter Alpha 2.
Dans le cas de Zangief, il apporte également un témoignage assez différent sur ses conditions de vie et d’entraînement. Avant de catcher des ours, l’imbécile version officielle, il exploite d’abord sa force dans une aciérie (thème commun de ses décors dans SF2, SF Alpha 2 et 3) ; on y est d’ailleurs loin du sacrifice héroïque d’un Stakhanov : à l’arrière plan, alcool, violence et paresse y semblent le lieu commun.
Dernier indice, l’origine sociale, qui se décline de la plus grande pauvreté (Blanka, SF2) à la plus grande aisance (le yacht dans le niveau de Ken, dans Super Street Fighter II - la précédente version figurait un steamboat défraîchi).
Cette fonction identitaire du décor avait un autre avantage, narratif celui-là : le décor motivait le combat, ni plus ni moins, et sans recourir à l’abracadabrant appareil scénaristique officiel (untel parcourt le monde pour venger son père/son ami/une défaite etc.). En effet, le lien très fort entre décor et personnage indiquait clairement qu’on entrait sur le territoire de l’adversaire et qu’en soi il s’agissait d’une agression. (La fin de la liaison entre décor et personnage me semble à ce propos un symbole très fort de la mondialisation. À creuser.)
Certains décors de Street Fighter IV sont indéniablement jolis, mais le problème reste qu’ils ne sont que cela :
Celui-là est très beau et on se dit à première vue qu’il est parfait pour Sagat. Sauf que d’après certains globe-trotters (merci Rafchan >__<), ce n’est pas en Thaïlande mais au Vietnam. Raté.
Si certains décors se rapportent manifestement à des personnages en particulier (Chine pour Chun-Li, Las-Vegas pour le boxeur, etc.), il s’agit davantage de références aux précédents décors qu’aux personnages à qui ils étaient destinés. Pour preuve la version de jour et de nuit du niveau de la jungle : laquelle correspond à Blanka ? À qui correspondrait la deuxième ?
À vrai dire, le problème n’est pas aussi crucial pour Blanka que pour les nouveaux personnages : si le monstre vert est déjà ancré dans l’affection des joueurs, ce n’est pas le cas des nouveaux qui souffriront de cette réduction du décor à une simple carte postale (j’ai quelques doutes sur la durée de vie du Français amnésique…). À l’exception de Seth qui a le sien… mais c’est un autre problème.
Commentaires
hé hé, merci pour le reversal ^^
C'est la notion de territoire qui me manque le plus. Ca donnait clairement une impression à la Megaman d'arriver chez un combattant et de l'affronter sur son terrain.
En Versus, jouer en "déplacement" ou "à domicile" indiquait aussi le vainqueur du match précédent; renforçant la notion de "challenger" tant mise en avant.
Tout ceci est bien vrai.
dans un sens ça rappelle les matches (de n'importe quel sport) avec les scores
Home / Visitors , et ça donne presque l'impression qu'un stage dédié à un personnage lui confère une force supplémentaire. (mais tu l'as déjà dit je crois)
Amen, je pense que tu a fais le tour de la question ^^
Personnellement, ce qui me choque le plus dans les décors de SFIV c'est cette fausse caractérisation extrêmement trompeuse. Pendant longtemps nous avons tous cru que le stage de la jungle était celui de Blanka, Vegas celui de Balrog/Bison ou encore la base aérienne celui de Guile.
Mais le fait qu'aucun de ces trois personnages ne soit véritablement lié à ces décors et que différents éléments de backgrounds suggèrent le contraire en font de vulgaires contrefaçons.
J'ai donc régulièrement l'impression de m'être fait pigeonner par Capcom. Un peu comme un touriste à qui l'on présenterait l'arche de la défense pour l'arc de triomphe et qui se rendrait compte de l'entourloupe après s'être fait truander toute son oseille.
Je me sens violé T.T
lol, vous avez tellement rien à dire de mauvais sur le jeu, que ça critique les décors, perso quand je joue je regarde mon adversaire, pas autour de lui :p
Non sans dec, bien marrant ce post :D
@Reppa : T'as raison on est que des sales aigris qui veulent chier à tout prix sur Street 4.
On est tellement méchant que le projet initiale était de foutre de l'anthrax dans chaque boite...
Sigh.
Sinon Mr Game A, c'est toujours un plaisir de lire tes articles, il y as ce petit quelque chose dedans qui me donne toujours envie de jouer immédiatement les jeux cités, en bien ou en mal.
Merci, c'est gentil^^
@Reppa : c'est dommage d'avoir commencé par lol, ça fait du mal à ton argumentaire.
Surtout que les décors n'évoquent plus rien quand ils ne sont plus attachés à un perso.
Ce sont juste UN décor comme un autre.
Alors que quand ils sont attachés à un décor ET à une musique (vous ne parlez pas de la pauvreté des ziks de SF 4?), c'est tout une ambiance qui vient avec le décor.... ce qui disparait un peu ici... dommage...
Effectivement c'est l'un des rares défaut du jeu... mais bon, c'est bien dommage de manquer un truc aussi simple qui existait dans TOUTES les versions précédentes....
J'arrète pas de lire à droite, à gauche, "les musiques de SF4 sont nazes" etc etc etc.
Bin merde, les musiques de SF4 me restent largement plus en tête que celles des 4 derniers Castlevania auxquels j'ai joué (et pour tout dire j'ai encore joué à Portrait of Ruin hier). Et franchement j'aimerais bien savoir si y'en a un seul parmi vous qui se souvient des ziques de ces jeux, sur lesquels personne ne crache jamais. Alors la musique de l'intro ok elle est atroce (encore que sans la voix ça pourrait presque passer).
Mais la musique de Africa <3 <3 <3
Il faut mieux choisir tes Castlevania, je ne vois que ça.^^
Personnellement je sauverais éventuellement Overpass mais c'est bien la seule. La musique du niveau africain patit de la nullité et de l'irresponsabilité idéologique du décor (il ne s'agit sans doute pas d'une base de l'ONU pour que le boxeur ou l'espagnol y paradent... c'est con mais ça m'a beaucoup dérangé vu ce que l'Afrique endure à cause d'armées rebelles IRL).
@kwyxz : Haaa, les coeurs world music sur le stage africain ça me fait saigner les oreilles !
Hadokuna Matata Ouwaaaaa :[== blerg
Akuma matata ?
Les critiques sur la musique ou les décors ont un avantage en commun : elles nous évitent la deception car du coup on ne s'attends plus à rien de bien et on se concentre sur THE qualité du jeu à savoir sa pêche extraordinaire.
J'ai moi aussi trouvé des défauts limites inadmissibles à la première partie (c'est surtout les menus du jeu qui me font vomir) mais la claque est telle, l'attente était si insupportable, qu'on passe outre la musique, les décors, même les menus, et on se régale.
Et puis ça faisait quelques années que quand je discutais jeux vidéos avec les quelques potes qui ne passent pas tout leur temps avec bobonne je me rendais compte que les joueurs encore intéressés par Street n'étaient pas légion.
Donc bravo Mr Capcom, vous venez de gagner ma fidélité pendant 20 autres années, qui seront employées à convertir des joueurs qui ont oubliés que l'important dans la vie c'est le skills.
Les tournois nocturnes ne risquent pas de s'arrêter........
@tentacleboy : bien vu ! Ca sonne mieux.